Île-de-France, Seine-et-Marne (77), "Tertre de Montereau / Aérodrome de Villaroche". Fouille 2018-19. Le Secteur Nord Est : seigneurie / hameau de Courceaux, occupations du haut Moyen Âge à la période moderne
Résumé
La fouille archéologique à Montereau-sur-le-Jard (Seine-et-Marne), Tertre de Montereau / Aérodrome de Villaroche s’est déroulée entre septembre 2018 et le printemps 2019. Elle a fait suite au diagnostic réalisé sous la direction d’Alexandra Mondoloni à l’automne 2015. Elle se divise en deux secteurs topographiques distincts : Sud / Central (protohistoire, 5,7 ha, et paléolithique, sous les responsabilités de Laëtitia Mathery et de Frédéric Blaser) et Nord Est, dit “médiéval” (2,5 ha, sous la responsabilité de Gilles Desrayaud). Le calendrier et les moyens engagés initiaux ont fait l’objet de plusieurs ajustements et prolongations, notamment d’une opération complémentaire pour la fouille paléolithique.
Le secteur Nord Est (Courceaux) :
A sept kilomètres au Nord de la Seine et du centre de la ville antique à médiévale de Melun, à une trentaine de kilomètres de Paris, le hameau de Courceaux se situe à la croisée d’anciens chemins cardinaux. Quelques maisons subsistent encore aujourd’hui (2022), au Sud-Est de l’intersection.
Une seigneurie (“alleu”), en possession partagée des vicomtes melunais et de l’abbaye de Saint-Maur-des-Fossés, y est mentionnée en 998 ap. J.-C., dans une confirmation du roi Robert le Pieux.
La fouille 2018-2019 du Secteur Nord-Est de la Zac du Tertre a permis d’ouvrir une fenêtre de 25 000 m2 à l’Ouest du site médiéval et moderne, dont la surface totale peut être estimée entre dix et quinze hectares.
Elle a été l’opportunité, plutôt rare en Île-de-France, d’étudier l’évolution d’une partie d’un “petit village” (“habitat groupé rural”) depuis le VIIIe jusqu’au XVIe siècle.
Près de 2000 faits stratigraphiques ont été inventoriés. Au Sud-Est du décapage, sur une zone de 2 300 m2, 300 d’entre eux ont été relevés en plan mais n’ont pas pu être appréhendés.
La présence, peu marquée, de céramique du Haut Empire et de probables fossés gallo-romains suggère une fréquentation des lieux depuis l’Antiquité. Certaines orientations linéaires paraissent perdurer aux siècles suivants.
Sur ce secteur du hameau, l’occupation médiévale ne semble pas antérieure à la fin de la période mérovingienne. Les productions céramiques les plus anciennes sont attribuables au VIIe siècle (moins de 20 tessons).
Deux petits fours à chaux et huit fours domestiques, dont certains s’organisent autour d’une grande mare, ainsi que quinze sépultures ont été mis au jour. Les datations archéomagnétiques et radiocarbones obtenues s’échelonnent principalement entre la fin du VIIe et le milieu du Xe siècle. Les deux groupes d’inhumations, de cinq et dix individus, s’organisent le long d’axes de partition marqués par des fossés. Aucun bâtiment n’a pu être attribué avec certitude à l’intervalle VIIe à IXe siècle.
Probablement à partir du Xe siècle, mais plus particulièrement au cours des XIe et XIIe siècles, plusieurs bâtiments sur poteaux plantés, accompagnés de “fonds de cabanes” (ateliers de tissage ?) et de silos, se développent de part et d’autre du chemin occidental.
Sur une large bande bordant la voie méridionale, quatre grands bâtiments, dont deux se recoupent, dépassent 200 m2 de surface au sol. Le plus vaste, composé de plus d’une quarantaine de points d’ancrage, atteint 330 m2. Quelles que soient leurs fonctions, ces édifices soulignent le statut privilégié du site à cette période (élite locale ?).
Au cours de la seconde moitié du XIIe et/ou de la première moitié du XIIIe siècle, les grandes constructions en bois sont abandonnées et l’occupation semble se recentrer vers le carrefour.
En 1176, apparaît la première référence écrite à la “mairie” de Courceaux, qui est un office confié généralement à un membre de l’élite rurale. Un acte de 1284 précise que le domaine direct atteignait une soixantaine d’arpents, soit environ 25 ha. Une chapelle est mentionnée en 1318, fondée par Jean dit Acelin de Courceaux, bailli de Joigny.
Sur le décapage de 2018-2019, à la fin du Moyen Âge central ou au début du bas Moyen Âge, un enclos fossoyé, relié à un probable bassin par une canalisation de pierres, est implanté. Plusieurs autres grands fossés évoquent la présence d’enclos complémentaires.
A partir du XIVe siècle, une cave bipartite monumentale et plusieurs bâtiments sur fondations apparaissent. La seigneurie semble être alors à son “apogée”.
Le fond d’un puits (ou puisard) maçonné a livré un assemblage de céramiques complètes, déposé entre le milieu du XIVe et le début du XVe siècle. 71 objets métalliques ont été attribués à l’intervalle XIIe-XVe siècle, avec une forte représentation des éléments à valeur ornementale et équestre.
D’après les mobiliers collectés, une relative “désertion” et la désaffection, au moins partielle, de la partie occidentale de la seigneurie avant le XVIIe siècle peuvent être supposées.
Dans un censier de 1536, parmi les 16 constructions mentionnées sur l’ensemble du domaine, la moitié est dite en “masure” (ruine). Il ne subsiste que deux édifices qualifiés d’hôtels (au Nord-Est et au Sud-Est du carrefour), et six maisons. Le bail de 1581 décrit les lieux sans ambages, en indiquant qu’il n’existait plus qu’une « masure où estoit antiennement l’hostel, manoir et jardins de Courceaux ».
Sur les plans de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle, aucun bâtiment n’apparaît à l’endroit de la fouille de 2018-2019. Ne figurent plus dans ce secteur que des terres labourables et une mare.
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